L’agriculture reste à mon sens un secteur dont on ne peut se passer dans les choix stratégiques de la politique de développement d’une nation.
Pourquoi je privilégie l’agriculture ?
D’après l’enquête d’Analyse Globale de la Vulnérabilité et de la Sécurité Alimentaire, l’agriculture pratiquée au Bénin est de type familial, orientée vers la polyculture associée au petit élevage traditionnel. Pourtant, le secteur agricole est vital pour l’économie nationale. Ce secteur représente 75% des recettes d’exportation, de produits locaux et 35% du Produit intérieur brut. C’est encore ce secteur qui emploie 70% de la population active.
Or, l’enquête révèle que l’agriculture béninoise ne permet pas d’assurer tous les besoins de la population qui s’y adonne. Avec un taux de pauvreté national de l’ordre de 37,5 % en 2006, 35,2 % en 2009 et 36,2 % en 2011, le Bénin reste un pays profondément pauvre (Banque Mondiale).
D’après la même institution, la croissance du PIB réel (5,5 % en 2014), devrait principalement être tirée du commerce et de l’agriculture.
En France, la profession agricole n’occupe que 3,3 % de la population active. Pourtant, la France occupe le second rang en matière de production agricole mondiale. Quant aux USA la population agricole active est de 2%. Si avec 2,0% de la population active, les Etats-Unis occupent la première place dans l’agriculture mondiale, quelle place pouvons-nous occuper avec plus de 50% de la population active béninoise ?
La première de toutes les ressources demeurent les ressources humaines, pensez-vous que c’est une faiblesse que plus de 50,06% de la population active s’adonnent à l’agriculture ?
Non, il s’agit bel et bien d’un atout. Les meilleures technologies au monde n’aboutissent pas à grande chose sans une ressource humaine de qualité.
Quels peuvent être les grandes orientations pour l’agriculture béninoise ?
Il faut reconnaître que des efforts ont été faits depuis notamment depuis 2007 avec le recrutement de plus de mille agents au profit du Ministère de l’Agriculture de l’Elevage et de la Pêche. Plusieurs projets et programmes sont mis en œuvre ou en cours de mise en œuvre. Mais sur le terrain, les résultats peinent toujours à s’affirmer. Les importations de produits agricoles flambentde plus en plus, les difficultés d’accès au marché des produits agricoles, le faible rendement des activités agricoles, et la plupart des contraintes du monde rural persistent toujours. Je propose par ce biais, des pistes de réflexions importantes de mon point de vue pour l’agriculture béninoise.
De la formation :
Si 2% de la population aux Etats Unis produisent pour assurer l’autosuffisance alimentaire des américains et occuper le premier rang mondial en matière de production agricole, c’est parce que ceux qui s’adonnent à l’agriculture sont des professionnels. Ils ont été formés pour être agriculteurs. Ils appartiennent à des coopératives fortes au sein desquelles ils s’informent, recrutent des experts pour leur recyclage permanent. Il ne s’agit pas des gens que des encadreurs persuadent des années durant à changer de pratiques culturales. Ce sont des gens qui veulent être entrepreneurs agricoles et qui sont prêts à accepter les innovations.
La question de la formation ne concerne pas seulement les agriculteurs, elle concerne aussi les cadres en charge de l’agriculture. Ils doivent être spécialisés et effectivement capacités. La recherche agricole doit être visibles et se mettre effectivement au service du monde rural.
De la diversification agricole
Les grands débats sur l’agriculture au Bénin se construisent autour du coton. On dirait que agriculture égale coton. A chaque campagne agricole, les batailles médiatiques de même que les contestations sur les prévisions, les surfaces emblavées et les quantités de tonnes de coton produit occasionnent des débats houleux sur la plupart des médias du pays. Jusqu’ici aucune contestation officielle n’a été faite sur les prévisions ni les surfaces emblavées pour le maïs, ou le niébé par exemple. Je n’ai rien contre la culture du coton mais j’estime que l’agriculture béninoise doit effectivement s’ouvrir à d‘autres filières et tenir réellement compte des atouts de chaque zone agro-écologique du pays. Des efforts de diversification se font notamment à travers le Projet d’Appui à la Diversification Agricole (PADA). Cependant, les résultats peinent à s’illustrer. Le contexte agricole actuel n’est pas propice à une réelle diversification agricole : les cadres doivent se spécialiser, les producteurs doivent être des entrepreneurs agricoles professionnels. La diversification agricole ne doit pas seulement se limiter aux filières prioritaires sélectionnées par le MAEP, bien d’autres spéculations peuvent faire l’objet de recherches et de vulgarisation.
Nous devons accorder plus de ressources pour assurer l’autosuffisance alimentaire de nos populations et une fois que la production dépasse le besoin, nous pouvons exporter.
Du financement de l’agriculture
L’une des contraintes cruciales qui fait que notre agriculture n’est pas compétitive c’est la question de son financement. En dehors du cotonculteur, le producteur est abandonné à son sort. Les quelques efforts d’appui financier sont inadaptés au contexte socio-économique caractérisé par la non maîtrise des intrants agricoles. Cette non maîtrise des intrants agricoles concernent aussi bien sa disponibilité que son coût. Il est vrai que l’engrais minéral est subventionné par l’Etat, mais cela ne suffit pas. Les matériels agricoles, les semences de toutes les spéculations, l’aliment de bétail, les produits de traitement etc… sont autant d’éléments qui requièrent une subvention et qui doivent être rendus disponibles. Le financement de l’agriculture ne limitera pas seulement à faire élaborer les micro-projets par les producteurs et à les financer tant bien que mal. Il s’agira de considérer avec beaucoup plus d’attention, l’environnement global du secteur agricole. Un bon plan de financement de l’agriculture fera de l’investissement agricole une bonne opportunité d’affaire.
De l’assurance agricole
Nous sommes arrivés à un niveau où faire de l’agro-business sans une assurance c’est comme se lancer d’un hélicoptère sans parachute. J’ai vu des investissements agricoles s’écrouler littéralement : des hectares de cultures inondés, des élevages décimés, ….
Mettre en place une assurance agricole adaptée à notre contexte constitue un gage de confiance pour les producteurs et les investisseurs.
De la question de l’élevage
L’élevage semble l’enfant malade du Ministère de l’Agriculture de l’élevage et de la Pêche. J’en veux pour preuve la liste des projets dédié au Programme de Développement de l’Elevage qui sont au nombre de quatre (4) contre vingt-trois (23) pour le programme de développement de l’Agriculture d’après la plateforme d’intervention des acteurs du monde rural. Dans la pratique c’est comme s’il n’y a pas de budget alloué à l’élevage. En cas d’épizooties où l’intervention devrait être d’urgence, c’est le moment de commencer à solliciter d’aides étrangères. L’élevage semble véritablement trop risqué actuellement au Bénin. La mauvaise gestion de la Peste Porcine Africaine (PPA) fait de cette épizootie une maladie endémique où chaque année des élevages de porcs sont détruits et laissant des éleveurs à la désolation. L’aviculteur vit dans la peur constante de la grippe aviaire récemment annoncée au Nigéria. L’élevage de lapins qui est en pleine expansion est entrain de subir les affres de maladie virale hémorragique bien qu’il existe en Europe un vaccin pour prévenir cette maladie. La question de l’élevage mérite d’être repensée et de faire l’objet de décisions conséquentes. Les éleveurs souffrent, en silence…
De la question de la pisciculture
La pisciculture est une activité qui prend assez d’ampleur de nos jours au Bénin. Nous devons reconnaître le rôle fondamental qu’ont joué et continuent de jouer les Japonais de la JICA (Agence Japonaise de Coopération Internationale) à travers des projets dont le PACODER (Projet d’Etude de la Promotion de l’Aquaculture Continentale en République du Bénin) et le PROVAC (Projet de Vulgarisation de l’Aquaculture Continentale) dans l’émergence de cette activité. En dehors du coût d’investissement élevé des infrastructures piscicoles, la principale contrainte de la pisciculture c’est la cherté de la provende importée. L’expertise pour la fabrication sur place de provende efficiente fait toujours défaut. La recherche agricole est encore sollicitée. La subvention des activités piscicoles permettra de réduire les coûts de production et de mieux rentabiliser l’activité….
De l’agriculture familiale
La promotion de l’entrepreneuriat agricole ne signifie pas qu’il faut supprimer l’agriculture familiale. Dans le même temps qu’il faut viser un autre type de producteurs, les paysans doivent être assistés puis organisés en coopératives dirigées par des responsables élus en leur sein. L’agriculture familiale ne se limitera pas seulement aux paysans, il est question en fait de l’agriculture extensive que toute personne peut entreprendre à petite échelle pour satisfaire ses propres besoins alimentaires.
De la question du genre
Dans le milieu rural, il est observé une catégorisation des activités agricoles en fonction des groupes socio-culturels. Certaines activités agricoles semblent revenir aux femmes et certaines d’autres aux hommes. Du moins, il est observé une prédisposition des femmes à mener certaines activités. La prise en compte du genre est donc d’une importance capitale pour ne pas écarter certains groupes socioculturels du monde rural. Les coopératives de femmes doivent être appuyées en moyen financiers matériels et humains et technique. Pareil pour les coopératives mixtes et celles des hommes. Mon objectif à ce niveau est de tenir compte du genre dans les planifications.
Agriculture et innovations technologiques
Notre agriculture ne doit pas être en marge des innovations technologiques. Nous sommes à l’ère de l’information et notre système agricole se doit de profiter pleinement de Internet et des applications spécialisées dans le domaine agricole. Pour ce faire, il faut former les cadres et les entrepreneurs agricoles au Web 2.0 et à l’informatique en général. L’informatisation du Ministère de l’Agriculture de l’Elevage et de la Pêche est à mon sens une solution pertinente à la lenteur administrative. Toutes les directions du MAEP peuvent être mises en réseau (intranet) pour favoriser le décloisonnement et la communication entre les services.
Quelques initiatives de mise en place de plateforme ont déjà été réalisées notamment la création des plateformes des acteurs intervenants dans le domaine agricole. Mais la mise à jour des données sur ces plateformes n’est pas encore une réussite car les acteurs ne sont pas bien formés à l’informatique et l’utilisation du Web.
Ce sont quelques orientations qui de mon point de vue permettront à faire de l’agriculture un pilier pour le développement du Bénin.
Le candidat qui dans son programme tiendra compte de ces questions attirera certainement mon attention et celle de bien d’autres béninois.
C’
J’aimeJ’aime
Tres belle lecture du secteur agricole beninois
J’aimeAimé par 1 personne
Merci Worou
J’aimeJ’aime